Le bus, bondé à cette heure, avec un bébé, mais quelle idée ? Mais elle n’a pas eu le choix la Rose, contrainte à prendre les transports en commun pour aller chercher leur fils à la crèche, Abel ayant besoin de la voiture pour un séminaire en dehors de la ville. Les journées comme celle-ci pourraient être aussi simples que les autres mais ne paraissent jamais l’être. Pour commencer, elle a dû arriver de justesse devant les portes de la crèche pour récupérer Eamon. Retenue à l’accueil de l’hôtel par la plainte intense d’un client, elle a regardé sa montre toutes les vingt secondes une fois l’heure passée, espérant s’extirper de la situation au plus vite. Légèrement agacée elle-même, elle était prête à lui répondre qu’elle avait autre chose à faire et que certaines obligations l’attendaient. Professionnelle jusqu’au bout des ongles, cependant, elle l’a écouté et a fait le nécessaire pour répondre à sa demande avant de le saluer et de filer au vestiaire pour se changer. Pensant pourvoir être à l’heure pour prendre le métro suivant, elle dût patienter encore, rongeant son frein. Elle le savait, elle l’avait dit à Abel que ce serait juste pour récupérer le nourrisson, mais en contrepartie, elle n’avait pas osé demander à son employeur de finir plus tôt. Elle a, ces derniers temps, bien trop l’impression de profiter de sa gentillesse. En abuser ne serait pas le bienvenu. Le tempérament de la mère s’est calmé une fois qu’on lui a remis son fils dans les bras. Apaisée en un instant par les prunelles de cet ange venu d’ailleurs, l’agitation du moment s’est estompée le temps d’un instant. Quelques minutes à peine, cependant, jusque’à monter dans un bus bien trop rempli, foncée de prendre son bébé dans les bras et de plier la poussette. Elle a hésité à le laisser passer, mais qu’est-ce qui pouvait lui assurer qu’en pleine heure de pointe, le bus suivant aurait été moins bondé ? Alors elle prend sur elle, protégeant son enfant des gestes maladroits aux alentours. Inutile d’espérer arriver jusque’à une place assise avec ce monde, et encore moins avec ce qu’elle transporte. Et puis, elle n’en a que pour deux arrêts. Les portes de la délivrance s’ouvrent enfin et elle est presque projetée à l’extérieur avec sa poussette. Elle prend quelques secondes pour rassembler ses esprits avant de déplier la poussette. Mais celle-ci coince et avec une seule main de libre, Noelia ne parvient pas à la débloquer. « Oh, mais c’est pas vrai ! » grogne la jeune femme tout en shootant dans le pneu de la poucette, comme si ça pouvait aider.