An evening along the coast of loneliness
FlashBack ((Mai, 2005))
w/ LIBRE

Mains tremblantes, elle ne sait pas vraiment où elle est, comment elle est arrivée là et surtout pourquoi. Toujours sure d’elle, la tête sur les épaules, la jeune Mahon a le monde a ses pieds et pourtant, en cet instant, elle a plutôt l’impression qu’il s’écroule et elle avec lui. En haut de cette coline, loin du tumulte de la ville, elle a le regard vrillé sur le pont et les buildings alors que sa main vient tourner machinalement cette nouvelle bague qui orne son doigt. Mariée. Tout s’était passé à une vitesse incroyable et en quelques mois, elle était passée de fiancée à l’homme de sa vie, celui a qui appartiendrait son cœur pour l’éternité, à femme d’un homme qu’elle méprise et déteste, seulement pour la prétention de sa famille. Gorge nouée et irritée, elle laisse une larme dévaler sa joue alors que sa douleur se tait dans sa cage thoracique. Silencieuse dans ses sentiments, comme toujours. Si elle l’ouvre facilement pour le reste, la famille lui avait indiqué qu’il n’était pas bon de ressentir et encore moins d’exprimer ce qu’elle ressentait. Elle était une femme, bonne pour réfléchir mais l’action et l’effluve des sentiments surtout colérique était réservé aux hommes. Ancré dans son âme, les regards de Tobias, son père, son frère défilent encore et encore. Le dégoût, la peur et l’effroi pour le premier. La fierté et la désolation pour le deuxième. La dureté, la droiture et la loyauté pour le dernier.

Alors que le soleil devient rouge, puis laisse doucement la place principale à la lune, elle reste là, proche de l’immobilité. Détruite par le dernier mois, ravagée par une peine qu’elle n’arrive pas à totalement décrire et encore moins à évacuer. Il est le seul à pouvoir l’aider à le faire, et pourtant, il est le seul à ne pas venir, à ne pas être là. Il est parti, son cœur avec lui et il ne reste plus que ce corps vide donné à un autre. Même son cerveau ne fonctionne plus correctement. Des pas à côté d’elle perturbent le vide dans lequel elle s’était enfermée. « Pas maintenant Axel. » Son garde du corps, toujours prêt d’elle avait dû finir par sortir de la voiture pour la forcer à entrer. Pourtant, ce n’est pas son pas et elle le reconnait. Levant la tête c’est une tout autre personne qui lui fait face. Inconnue, éloignée probablement de son monde. Mécaniquement, et sans savoir d’où cela vient, elle rétorque rapidement. « Je vous ai pris pour quelqu’un d’autre. La place est prise, mais vous avez un autre banc un peu plus loin. » Elle ne laisse pas trop le choix, ni la discussion ouverte. Ici, se trouve le lieu qu’elle partageait avec Tobias, qui que soit cette personne, elle ne voit pas l’utilité de sa présence et tente donc, comme elle sait si bien le faire, d’effacer le problème…